(BFM Bourse) - Les places asiatiques ont accusé ce lundi de lourdes pertes, en raison des craintes d'une récession économique aux Etats-Unis. Dont Tokyo et son indice vedette Nikkei qui a subi une chute historique.
Les indices européens accusent le coup en ce début du mois d'août, emportés dans un mouvement de vente général. Ce dernier a été enclenché par les craintes d'une récession aux Etats-Unis après la publication en fin de semaine, de statistiques dégradées sur le front de l'activité manufacturière et de l'emploi.
A Paris, le CAC 40 limite son repli à 1,90%, après avoir plongé de plus de 3% et touché un plus bas à 7.029,91 points ce lundi matin.
"Ce que nous observons actuellement, c'est une situation dans laquelle le marché considère que ce qui se passe dans la macroéconomie américaine coche la case de la récession", observe Robert Carnell, responsable de la recherche pour l'Asie-Pacifique chez ING cité par Reuters.
Ces mauvaises données sur l'emploi et l'activité manufacturière "poussent certains analystes à parier sur une baisse des taux de 50 points de base (0,5 point de pourcentage) lors de la prochaine réunion de la Fed de septembre afin d'éviter un 'hard landing', c'est-à-dire une baisse de l'inflation au prix d'un fort ralentissement économique," signale de son côté John Plassard, spécialiste de l'investissement pour Mirabaud.
"Bear market" à Tokyo
Mais c'est en Asie que les mouvements les plus brutaux ont été observés ce lundi. A la Bourse de Tokyo, l'indice Nikkei 225 a perdu 12,4% lundi à 31.458,42 points, essuyant sa plus forte baisse en une seule séance. Il s'agit de son plus lourd repli depuis le "lundi noir" du 20 octobre 1987, selon des données de LSEG citées par Reuters. Le baromètre du marché tokyoïte perd près de 30% depuis son pic du 11 juillet (42.426,77 points), et a ainsi plongé en territoire dit de "bear market" (qui correspond à une chute supérieure à 20% depuis un plus haut récent).
"Le marché actions japonais a connu sa plus forte baisse mensuelle (15%) depuis la pandémie de COVID (30%), la corrélation négative entre le yen et les actions s'étant renforcée. La faiblesse des chiffres de l'emploi vendredi a accéléré la tendance en place, la baisse des rendements et la déflation des multiples de bénéfices, confirmant la crainte pour la croissance", signale Robecco. Un élément technique vient aussi appuyer ces dégagements sur les indices japonais, avancent les spécialistes. "Le processus de dénouement du 'carry trade' se poursuit, les positions fortement vendeuses (yen) continuant d'être stoppées et les appels de marge sur les actions s'accélérant (7 magnifiques et actions japonaises)", explique aussi Robecco.
Le "carry trade", consiste à profiter des écarts de rendement entre différents types d'actifs quelques semaines sur le marché des changes. Concrètement, cette technique d'arbitrage consiste à s'endetter dans une devise à faible taux d'intérêt et à placer les fonds empruntés dans une autre devise à plus haut intérêt ou des actions technologiques. Pendant des années, le yen a été, sans surprise, l'une des devises de financement les plus prisées pour ces stratégies, rappelle Michael Brown analyste de marchés chez Pepperstone.
Or, cette stratégie est mise à mal par les anticipations plus importantes que prévu de baisses de taux de la Fed, quand la Banque du Japon fait le mouvement inverse, après des décennies de taux négatifs. "Cependant le déclencheur immédiat de cette aversion au risque semble être la hausse inattendue des taux d'intérêt" annoncée mercredi par la Banque du Japon, selon Dilin Wu, stratégiste chez Pepperstone cité par l'AFP.
"Un coup de tonnerre"
Mercredi, la Banque du Japon a en effet relevé son taux directeur à 0,25%, soit à un niveau inédit depuis 2008. "Cette décision a frappé le marché boursier japonais comme un coup de tonnerre", poursuit la stratégiste.
Aussi, le ministre japonais des Finances a confirmé le soir même être intervenu sur le marché des changes à hauteur de 37 milliards de dollars en juillet pour soutenir le yen qui était alors tombé au plus bas en 38 ans face au billet vert. Or, le renforcement du yen induit par ces deux actions pénalise les groupes exportateurs majoritairement présents dans l'indice vedette japonais. Jeudi, le Nikkei avait ainsi perdu 2,49% puis 5,8% le lendemain.
Les Bourses de Séoul et de Taïwan ne sont pas en reste et ont été emportées par ce mouvement de vente généralisé. A Seoul, le Kospi a décroché de près de 8,8% à la clôture, soit sa plus forte baisse depuis octobre 2008 et les échanges ont même été brièvement suspendus avec l'activation des coupe-circuits, a signalé l'agence de presse coréenne Yonhap. L'indice principal de la Bourse de Taiwan a chuté de 8,4%, soit son plus fort repli en une séance depuis le 20 novembre 2000, selon des données de LSEG citées par Reuters.
Après avoir résisté dans la journée, les indices chinois ont eux aussi cédé à l'appel de la baisse même si le repli est beaucoup plus mesuré. L'indice Hang Seng de Hong Kong a perdu plus de 2% quand l'indice composite de Shanghai a reculé de 1,5% et celui de Shenzhen de 1,85%.